Pour répondre à cette question et en cerner tous les contours, le CCAE/B a tenu – une première – à privilégier l'expertise des Africains dans la lecture des situations conflictuelles qui sévissent sur leur continent.
Des discussions et échanges entre les différents intervenants et
les
participants, nombreux à cette rencontre, se sont clairement
dégagés
les préoccupations et les constats suivants :
1° Les populations de l'Afrique centrale sont plus que jamais
lassées
par tous ces conflits meurtriers qui leur sont imposés depuis
des
décennies. C'est pourquoi, dans presque tous les pays, on ne
dénote
aucune adhésion populaire aux entreprises machiavéliques des
seigneurs de guerre et de leurs commanditaires, même si ce
désaveu ne
prend pas partout la forme d'une résistance armée.
2° La dimension régionale de ces conflits s'avère évidente, et
dans
l'imbrication de divers protagonistes et dans l'interconnexion
des
causes à l'origine desdits conflits. Ceci devrait interpeller tous
ceux qui souhaitent faire une lecture correcte de ces situations
conflictuelles, sans pour autant les autoriser à faire l'économie
d'une analyse de chaque foyer de belligérance spécifique.
3° Les images des atrocités dont les populations civiles font
quotidiennement les frais du fait de ces conflits armés devraient
être davantage médiatisées. L'indifférence de l'opinion
internationale ainsi que le sentiment d'impunité dont se
prévalent
les seigneurs de guerre et leurs commanditaires découlent en
grande
partie de la non exploitation des images, pourtant disponibles,
sur
les exactions commises dans cette région.
4° La paix et la sécurité en Afrique centrale ne pourront être
possibles sans l'institution d'une justice équitable et
indépendante
pour punir les auteurs des crimes de guerre et/ou des crimes
contre
l'humanité, que ceux-ci appartiennent au camp des vainqueurs
ou à
celui des vaincus.
5° Les conflits armés qui sévissent en Afrique, en général, et en
Afrique centrale, en particulier, participent du plan concerté
d'exploitation et de spoliation des ressources multiples dont
regorgent nos pays. Il importe, dès lors, de dénoncer toutes les
lectures alimentaires qui se complaisent dans des description
misérabilistes mais superficielles, tout en dédouanant les vrais
entrepreneurs des conflits en question.
6° Cette relecture des situations conflictuelles appelle
également à
une revisitation de la terminologie couramment utilisée pour
désigner
les différents protagonistes ainsi que pour appréhender les
tenants
et les aboutissants des conflits en question.
On veillera, par exemple, à ne plus faire d'amalgame entre ceux
qui
se laissent instrumentaliser dans une collaboration passive ou
active, et ceux qui, pour défendre leur souveraineté, ont opté
pour
la résistance pacifique ou armée.
7° Les participants ont tous reconnu et souligné la nécessité de
multiplier ce genre d'échanges entre tous ceux qui œuvrent pour
l'instauration d'un nouvel ordre social et politique en Afrique
centrale, ressortissants des pays concernés ou personnes de
bonne
volonté.
8° Tout en remerciant les administrations et les organismes qui
ont
permis la bonne organisation de ce colloque (CGRI, DGCI,
ULB,etc.),
les participants ont dénoncé haut et fort les facilités de
circulation généralement offertes aux délinquants politiques et
autres, responsables et/ou profiteurs des situations
conflictuelles
en Afrique, alors que les visas sont refusés à ceux qui
s'investissent dans la dynamique de la paix et du
développement en
Afrique.
Ainsi fait à Bruxelles, ce 3 novembre 2001.
Les Intervenants :
Mme Laetitia KALIMBIRIRO, Administratrice CCAE/B (Belgique)
Emmanuel NASHI, Journaliste & Chercheur à l'UCL (Belgique)
Charles NTAMPAKA, Juriste (Belgique)
Wamu OYATAMBWE, Chercheur à la VUB (Belgique)
Moïse CIFENDE, Juriste & Chercheur à l'UCL (Belgique)
François ZOKA, Justice et Libération (RDC)
Raphaël NTIBAZONKIZA, Expert aux Négociations d'Arusha (Belgique)
Joseph MATATA, Centre de Lutte contre l'Impunité (Belgique)
Raf CUSTERS, Journaliste (Belgique)
Félicien KAZADI, président du CCAE/B (Belgique)
Charles DJUNGU-SIMBA K., Journaliste & Ecrivain (France) -